Quand Reporter sans frontières fait diversion...
par Pierre de La Coste
Voici quelques remarques complémentaires depuis mon retour d'Onusie (en passant par la véritable Tunisie pour essayer de rencontrer "les vrais gens" que nous n'avions pratiquement pas le droit de voir pendant le sommet...)
Tout d'abord, fallait-il, comme le demande Reporter sans frontières, refuser d'organiser le sommet à Tunis, parce que le régime ne respecte ni les droits de l'homme ni la liberté d'expression? Fallait-il boycotter le SMSI? Ma réponse est non, résolument non.
Il est clair que la liberté d'expression n'existe pas en Tunisie. Dans la presse en langue française, mise à disposition des congressistes, la flagornerie à l'égard du Président Ben Ali est consternante. Le même Ben Ali, se retrouve sur des affiches géantes à tous les coins de rue. Un véritable Big brother...
Ben Ali-Big Brother, à tous les coins de rue...
Les journalistes étrangers qui enquêtent sur les droits de l'homme ne sont pas les bienvenus, certes Mais le coup de pub de Reporter sans frontières (dont le secrétaire général Robert Ménard s'est fait expulser de Tunis, mais dont l'organisation était bien présente au sommet) laisse un goût amer. Tout d'abord, Ménard, à plusieurs reprises, a déformé la réalité du sommet jusqu'à en faire un "sommet de l'information", c'est à dire consacré à la liberté de la presse et aux médias, ce qui est évidemment absurde en Tunisie. Pourquoi ce racourci trompeur? Pour masquer le fait que le sommet, comme son nom l'indique, est consacré à la société de l'information, c'est à dire aux technologies de l'information et de la communication, ou encore à Internet.
L'objet du sommet était donc la gouvernance de l'Internet et la fracture numérique Nord/Sud. Bien entendu, le droit à l'information, inhérent à Internet, suppose la liberté de la presse et des médias. Mais, contrairement à ce que dit RSF, il est beaucoup plus difficile de censurer Internet que de censurer la presse "classique". Le SMSI, organisé à Tunis, n'a pu qu'accélerer les progrès du Réseau en Tunisie.
Le sommet mettait largement en cause la domination américaine sur Internet, comme nous l'avons dit. Mais l'action de RSF, dont la complaisance à l'égard de l'administration Bush n'est plsu à démontrer, a détourné l'attention, au moins auprès des médias français, des véritables enjeux du SMSI. Tentative de diversion?
(prochain et dernier papier: conclusion)
Les commentaires récents